TaxPage - Limits to capital gains exemption – partial indirect liquidation
Introduction
Dans ce dernier numéro de notre série consacrée aux limites de l’exonération des gains en capital, nous abordons la problématique de la requalification d’un gain exonéré en revenu imposable, en particulier dans le contexte des clauses d’earn-out.
Problématique
Il est courant, lors de la vente d’une société, que le contrat contienne une clause dite « d’earn-out ». Celle-ci prévoit qu’une partie du prix d’achat soit versée ultérieurement au vendeur, en fonction de la survenance d’événements futurs. En général, le prix comprend une composante fixe et une composante variable, cette dernière pouvant dépendre de diverses conditions telles que l’obtention d’autorisations administratives, la réalisation d’un chiffre d’affaires déterminé, ou encore le règlement de litiges.
En principe, le gain total issu d’une telle vente bénéficie de l’exonération prévue à l’article 16, alinéa 3 LIFD. Toutefois, dans certaines circonstances, l’administration fiscale peut requalifier tout ou partie de l’earn-out en revenu imposable si elle considère qu’il rémunère autre chose que la simple cession des titres. Cette situation peut notamment se présenter lorsque la valeur de la société est étroitement liée à la personne du vendeur et que le contrat prévoit la poursuite de son activité salariée, ou encore le respect d’une clause de non-concurrence.
Points de vigilance
Contrairement à d'autres mécanismes comme la liquidation partielle indirecte ou la transposition, il n’existe pas de disposition légale ou de circulaire définissant les conditions précises justifiant une telle requalification. Néanmoins, la jurisprudence permet d’identifier certains critères pertinents.
Le point central à analyser est la nature réelle de l’earn-out : rémunère-t-il uniquement le transfert d’actions ou vise-t-il un engagement complémentaire du vendeur ? Si l’earn-out vise à compenser la poursuite d’une relation de travail ou le respect d’une clause de non-concurrence, il sera considéré comme un revenu d’activité dépendante, soumis à l’impôt et aux charges sociales.
Les indices pouvant conduire à une telle requalification incluent notamment :
- Une baisse de rémunération salariale du vendeur après la vente, suggérant que l’earn-out compense partiellement cette réduction ;
- Un prix de vente excédant manifestement la valeur de marché, laissant entendre qu’une partie du prix couvre d’autres obligations ;
- Un traitement différencié des vendeurs, par exemple un earn-out plus élevé pour ceux qui restent liés par un rapport de travail après la cession ;
- Une condition explicite du contrat de vente, liant le versement de l’earn-out au maintien d’un emploi ou au respect d’une clause de non-concurrence.
Dans le cas de sociétés dont la performance repose en grande partie sur une ou plusieurs personnes clés, il est essentiel que la structuration du prix de vente soit clairement documentée dans le contrat. Le vendeur devra notamment s’assurer :
- que le prix de vente reflète la valeur de marché (le cas échéant, à l’appui d’une expertise) ;
- qu’en cas de poursuite de l’activité salariée, la rémunération reste conforme à celle perçue avant la vente ;
- qu’aucun lien contractuel n’associe expressément le paiement de l’earn-out au maintien des rapports de travail ou au respect d’une clause de non-concurrence. Sur ce dernier point, l’utilisation d’une clause pénale classique peut s’avérer préférable.
Conclusion
L’absence de cadre légal clair entourant la requalification de l’earn-out invite à la prudence, en particulier lorsque la valeur de la société est étroitement liée à la personne du vendeur. Il est crucial de bien anticiper les risques lors de la rédaction des clauses contractuelles. Cela dit, les earn-outs résultent souvent de négociations complexes entre des parties aux intérêts divergents. Comme pour toute opération de vente ou de restructuration, un accompagnement professionnel avisé et, le cas échéant, une demande de ruling auprès de l’administration fiscale, sont vivement recommandés.
Un article de Daniel Gatenby